Dépôt d'un important rapport au Barreau qui trace le portrait du harcèlement et des violences sexuelles existant dans la profession

22 février 2021

Le 9 février 2021, à la suite d’une recherche menée par des chercheurs de l’Université Laval, le Barreau du Québec publiait un important rapport sur le harcèlement et les violences à caractère sexuel dans la pratique du droit. Le professeur Antoine Pellerin est l'un des signataires de ce rapport et la doyenne de la Faculté Anne-Marie Laflamme a été impliquée dans le développement de ce projet. Cette enquête trouve son origine dans un projet d’action concerté réalisé entre 2015 et 2018 qui portait sur 11 professions, dont la pratique du droit. Les résultats de cette recherche ont démontré que les violences basées sur le genre étaient présentes dans toutes les professions, incluant le droit. Reconnaissant le manque de données récentes sur le sujet, le Barreau a décidé de mandater l’équipe de l’Université Laval pour documenter les enjeux de harcèlement et de violences à caractère sexuel. Cette recherche a été rendue possible grâce au soutien financier du Fonds de recherche société et culture du Québec (FRQSC), de l’Institut Équité Diversité Inclusion Intersectionnalité et du Barreau du Québec.

Sur les 27 137 membres du Barreau et stagiaires en droit qui ont été interrogés, 14% ont retourné le questionnaire. Le harcèlement sexuel est la catégorie de violence la plus rapportée par l’ensemble des participants (22%) et participantes (50%). Les formes de comportements sexuels non désirés les plus rapportés par les femmes (27%) sont d’avoir été touchées d’une façon qui les a rendues mal à l’aise. Ce sont également 21% des répondantes et 12% des répondants qui disent qu’une personne dans le cadre de leur pratique professionnelle a tenté d’établir une relation intime ou sexuelle avec eux et elles malgré leurs efforts pour les décourager. Près de 2% des femmes ont répondu oui à l’énoncé «A eu des relations sexuelles avec vous alors que vous ne le vouliez pas?». Ce ne sont que 1% des hommes et des femmes ayant répondu à la question sur le signalement des gestes répréhensibles qui les ont rapportés à la police ou au Syndic du Barreau. La recherche montre aussi que certains groupes sont plus à risque: les femmes, les personnes membres de la communauté LGBTQ+ ainsi que les personnes racisées.

Presque une femme sur 20 ayant vécu des violences à caractère sexuel dit avoir subi des conséquences négatives parce qu’elle a refusé de s’engager dans des activités sexuelles, 3% disent qu’on leur a laissé entrevoir qu’elles seraient récompensées pour un échange futur de faveurs sexuelles et 2% des femmes rapportent qu’on leur a fait craindre des représailles si elles refusaient de s’engager dans des activités sexuelles. Les différentes violences ont des impacts sur la carrière des personnes qui les subissent. Cela peut se traduire par différents comportements ou stratégies individuelles incluant la modification de ses habitudes, une organisation différente du travail ou un changement dans le parcours professionnel. Les résultats, incluant les récits de personnes ayant vécu des violences ou en ayant été témoins ou confidentes, font état d’une culture professionnelle qui favorise le silence et l’impunité face au harcèlement et aux violences à caractère sexuel.

En conclusion, le rapport recommande de:

  • créer un groupe de travail dédié à l’étude de ce rapport et à l’élaboration de pistes d’actions à mettre en place
  • mener une consultation auprès des principales parties prenantes concernées par l’enquête afin d’échanger sur les résultats et recueillir les actions qu’elles seront en mesure de mener en matière de lutte au harcèlement et aux violences à caractère sexuel
  • diffuser les résultats auprès des membres du Barreau dans une perspective d’échange et de reconnaissance de l’importance de leur contribution
  • rendre accessible au grand public les résultats de l’enquête et les pistes d’action qui seront implantées afin que le travail effectué puisse bénéficier plus largement à d’autres milieux

En réponse au rapport, le Barreau entend mettre sur pied pour ses membres des formations gratuites sur le harcèlement et les violences sexuelles — il est envisagé qu’elles soient obligatoires. Un comité sera aussi responsable d’élaborer des pistes d’action supplémentaires et d’assurer le suivi du rapport.